Catholiques = intégristes = fillonnistes ?

     François Fillon est catholique ce qui est tout à fait son droit. Fillon est de droite ce que tout le monde peut constater. Des catholiques traditionalistes soutiennent Fillon et celui-ci ne refuse pas leur soutien. Il n'en faut pas plus pour que certains se livrent à des amalgames démontrant un haut niveau de paresse intellectuelle. 

     Reprenons : 

     1° Il faudrait d'abord se poser la question de savoir qui est "catholique". En effet, l'État laïc ne "reconnait" aucun culte (voir mon article sur la laïcité dont l'URL ne correspond bizarrement pas au titre ! :http://gerard.fretelliere.over-blog.com/article-les-partis-de-gauche-sont-ils-laiques-116306840.html ). C'est différent de ce qui a cours dans la plupart des  pays d'Asie Occidentale où on est assigné à une religion dès sa naissance sans  pouvoir en changer de toute sa vie et sans pouvoir, a fortiori, se déclarer athée. Donc, être chrétien , musulman, juif, athée, bouddhiste est un choix qui peut être remis en question à tout moment. Un catholique est une personne qui se considère catholique ! Ceci étant posé, il y a autant de façon de vivre sa foi qu'il y a de catholiques. Il ne suffit pas d'être baptisé (car, on peut, ensuite, se considérer non catholique), ni de faire preuve d'une grande assiduité aux offices. 

     2° Le fait d'être chrétien n'entraîne pas ipso facto le fait d'être de droite et vice versa. Nombre de militants associatifs, syndicaux, politiques... de gauche sont catholiques (ou plus largement chrétiens) mais ne voient pas l'intérêt de le crier sur tous les toits. Il est vrai que dans l'esprit de certains militants obtus, quand on est de gauche on ne peut pas être chrétien. D'où la tirade célèbre de l'ex-pasionaria de Lutte Ouvrière qui refusait à l'avance tout soutien à une éventuelle candidature de Charles Piaget en 1974, sous prétexte qu'il "allait à la messe tous les jours". 

     3° Évoquer un "électorat catholique" (au singulier) comme le fait "Le Monde" est donc faux. Les catholiques se répartissent, de façon inégale certes, sur tout l'échiquier politique. Et des hommes comme Bayrou ou Delors sont appréciés par de nombreux catholiques. Et puis, surtout, il y a une "laïcisation" du vote : les catholiques - comme les autres électeurs - choisissent d'abord ceux qui leur semblent les plus compétents. A condition qu'ils ne mettent pas en cause leurs valeurs fondamentales. De toute façon, à la différence des États-Unis, la conviction religieuse est rarement un argument électoral et aucun président n'a jamais été élu principalement pour cette raison. En somme, les catholiques, dans leur ensemble, sont moins à droite que ne le croient la presse et... Fillon.

     4° François Fillon n'a pas souvent été aperçu aux offices dominicaux à Sablé mais ça ne veut donc rien dire et il n'y a aucune raison de suspecter sa foi. On pourrait être plus dubitatif vis à vis d'un homme politique sur le déclin qui proclamait : "je suis chrétien" sans que cela apparaisse crédible. 

     5° Jusqu'à une période récente, Fillon n'affichait pas son catholicisme. Localement, il se faisait élire surtout comme héritier de Joël le Theule. Cette retenue dans l'affichage de sa religion n'a été brisée qu'une fois, au début du septennat mitterrandien quand il a justifié son vote favorable à l'abolition de la peine de mort en disant qu'un chrétien ne pouvait pas accepter un tel châtiment. Ce qui est tout à son honneur. Par contre, il a toujours fait preuve d'un soutien sans faille vis à vis de l'enseignement privé confessionnel. 

     6° A Sablé, il n'a jamais tenté d'imposer un quelconque ordre clérical. Surtout pas dans le domaine culturel. D'ailleurs ses listes ont toujours été composées plus en fonction d'intérêts socio-économiques que de considérations religieuses. En général, parmi ses candidats il n'y avait pas plus de catholiques pratiquants que sur la liste d'opposition de gauche. Enfin, on ne peut pas dire que la paroisse catholique a été privilégiée d'une façon quelconque (à la différence de l'enseignement privé)

     7° Fillon n'a quasiment jamais habité la ville de Sablé dont il a été l'élu pendant 20 ans. Depuis plus d'une vingtaine d'années, il réside à Solesmes dans un château. Il a été conseiller municipal de cette commune pendant 13 ans, après avoir abandonné la mairie de Sablé. Or, cette banlieue plutôt bourgeoise de Sablé possède un très influent monastère bénédictin dont les moines sont traditionalistes sans être intégristes. Fillon a des liens solides avec ces moines ce qui l'a peut-être influencé dans certaines de ses prises de position. Mais souvent Fillon varie ! 

     8° Ceux qui connaissent bien Sablé et ses habitants ont remarqué que deux musulmans locaux assez connus (l'un a même eu les honneurs des médias nationaux) soutenaient Fillon sans ambiguïté. Auront-ils de l'influence dans leur communauté religieuse ? Difficile à dire car - là aussi - il faut constater la pluralité du vote ce que prouve la présence de jeunes musulmans sur la liste de gauche en 2014. En tout cas, on ne peut en déduire que Fillon est le candidat des musulmans..

     9° Fillon intégriste ? Non ! Fillon fasciste ? Encore moins. D'ailleurs, le dernier à avoir ainsi traité le candidat aux primaires était un ancien militant d'extrême droite qui  co-dirigeait une liste d'opposition en 1983 ; liste de droite sans conteste qui fit un bide monumental en finissant dernière malgré une campagne à l'américaine d'une rare violence verbale.